Fers à béton, échafaudage et sacs à gravats

J’appelle “Réinterprétation dimensionnelle” tout travail consistant à déployer une image ou un objet dans des dimensions qui n’étaient pas les siennes initialement, avec une prédilection pour le déploiement en volume d’éléments initialement plans, notamment des images.

Soit rien de moins que l’inversion du principe présidant à la création des images, consistant à évoquer ou interpréter un volume ou un espace sur un plan. Ici, je tente, à l’inverse, d’extirper du volume à partir de plans, de créer de la sculpture à partir d’images.

Peut-on faire de la sculpture à partir de photographies ?

À priori, c’est inconcevable, parfaitement antinomique : 2 pôles bien distincts permettent de classer les arts plastiques, les images d’un coté, les volumes de l’autre (avec certes quelques intrusions de part et d’autre de la frontière). Avec la 3D, je pense que la distinction image-volume, et donc image-sculpture n’a plus vraiment de sens et est amenée à disparaître… au profit des volumes et de la sculpture.
Je crois à la fin des images et je réalise ce travail de réinterprétation dimensionnelle en tant que métaphore de l’absorption à venir de l’image par la sculpture.

Transformer une photographie en sculpture en réinterprétant les données incluses dans l’image.

Il ne s’agit en aucun cas de tenter de reconstituer le volume qui a servi de sujet à la création de l’image. Ce sont les données de l’image elle-même qui génèrent un volume. Le volume ainsi obtenu n’a plus grand chose à voir avec l’espace initialement capturé, nous rappelant que la prise de vue est déjà une réinterprétation.

“Escalier mécanique, métro Porte d’Ivry”, réinterprétation dimensionnelle n° r_385, vue de la caméra 6, 2011

Puis montrer la sculpture obtenue sous la forme… d’images.

La distinction entre plans et espaces n’est déjà plus très claire dans notre esprit. Nous nous immergeons avec joie dans les images, toujours + fines et réalistes. Si je regarde un tirage photo, le basculement est constant entre la conscience du media “papier-image-plan” et son oubli pour l’acceptation de l’espace représenté. À l’intérieur d’un écran, le doute s’installe encore plus facilement car le sujet bouge : c’est un espace qui m’est donné à voir, comme à travers une fenêtre.
En animant mes sculptures, je donne à voir le paradoxe suivant : c’est au fur et à mesure que je leur confère une épaisseur que je prouve qu’il s’agissait initialement d’un plan !
Je transforme l’illusion d’un espace en l’illusion d’un autre espace, très lentement, pour interroger sur le moment où le basculement de statut intervient.

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